Street Cop
Avec ses illustrations de Street Cop – un récit fou, noir, crépitant, signé Robert Coover et dont Flammarion publie la VF – Art Spiegelman retrouve la dimension sensible et distanciée mise en œuvre dans Maus et À l’ombre des tours mortes, à la fois réponse au 11 septembre et célébration des comics grâce auxquels l’artiste avait surmonté sa dépression post-traumatique. Belle occasion pour la Galerie Martel de mettre en lumière Spiegelman l’illustrateur, souvent masqué derrière Spiegelman le créateur. À partir du XX novembre, la Galerie exposera, outre ses originaux, ses études et croquis préparatoires – ceux de Street Cop bien sûr, mais aussi de sa fabuleuse Nuit d’enfer, en passant par ses couvertures du New Yorker, sans compter d’autres merveilles.
Street Cop est une novelette, un court récit enchâssé dans un livre minuscule : « Son édition américaine », s’amuse Art Spiegelman, « est plus petite que mon iPhone ! » Mais attention. Par son contenu, l’ouvrage tient du bull terrier, pas du yorkshire. Un street cop, c’est un flic patrouilleur. Celui-ci n’est pas nommé. La ville où il évolue, non plus. Notre flic s’est engagé dans la police pour se refaire une virginité : c’est un ancien voleur, un ex-dealer. Dans sa ville, rien n’est fixe. Rien n’est stable. Les quartiers changent de place. Un immeuble peut s’enrouler autour de vous et chercher à vous tuer : il sort directement d’une de ces imprimantes 3D qui reconstruisent sans cesse la ville en temps réel. La majorité des flics sont des robots. Coupables ou innocents, ils butent plus vite que leur ombre. Soumis aux mêmes règles, notre patrouilleur, lui, est un homme – ou ce qu’il en reste. Dépassé par la technique, par les puces dont est lardé son uniforme. Dépassé par Electra, son assistante personnelle virtuelle. Dépassé par son mobile, dont les centaines d’apps lui échappent. Electra l’aiguillera sur une étrange affaire, celle d’un cadavre « complètement mâchonné. » Pourquoi ? Parce que les corps retrouvés sur les trottoirs servent de nourriture aux morts-vivants vendus comme animaux de compagnie par des boutiques spécialisées. Toutes les péripéties, textuelles et graphiques, sont à la hauteur.
Coover et Spiegelman détestent les étiquettes. Le premier refuse celle d’« écrivain postmoderne ». Le second, celle d’inventeur du « roman graphique » : il parle toujours de comics. « Lorsque j’ai reçu le manuscrit de Coover, j’ai prié qu’il n’y soit question ni de souris ni de juifs », s’exclame l’auteur de Maus. Rien à craindre. Dans le tempo de Blade Runner, de Taxi Driver ou d’Ubik, voire d’un collage chanté de Dylan, Street Cop pointe vers d’autres faces de la folie humaine, mâtinées de solitude, d’amoralité, de décomposition. Pour animer cet univers qui a toujours existé mais est déjà le nôtre, Spiegelman a pioché son casting dans sa collection de comics : son Street Cop prend le visage d’un Sluggo adulte – Sluggo ? En VF, c’est Arthur, ce gamin des rues au crâne rasé, croqué dans les années 30 par Ernie Bushmiller pour être le copain de son héroïne Nancy, Zoé en français. Sous l’encre de Spiegelman, les deux se retrouveront lors de la « nudie night » d’un bar sordide. Car ce soir-là, dans ce rade, tous les consommateurs sont nus. Parmi eux : Betty Boop, la Little Orphan Annie de Harold Gray, Ignatz la souris de George Herriman, un porc dont le tatouage annonce en hébreu « casher » et qui prend langue au sens propre avec une Picasso dépoitraillée, plus le barbu en turban de Gene Ahern et sa fameuse énigme « Nov shmoz ka pop ? » Mais pour trouver Dagwood, le mari de la Blondie créée par Chic Young, il vous faudra pousser quelques pages plus loin, lorsque le Street Cop passera la porte de l’animalerie où les morts-vivants grognent dans leurs cages.
« Street Cop était une utopie négative », note Spiegelman. « Mais pas celle dans laquelle nous plongeait la Covid. Au contraire, Street Cop était le cauchemar des voisins d’à côté. Si bien que j’ai pu l’investir. » Pour l’artiste, entre ce présent du récit qui évoque autant notre futur proche que le passé de ses comics, l’inspiration a reposé sur l’oubli des données temporelles : « Dans le livre, mes illustrations sont disposées afin de coïncider avec la page de texte précédente comme avec la page suivante, celle que le lecteur n’a pas encore découverte. Le dessin contient donc des infos à retrouver plus tard dans le corps du récit. L’idée est de mixer graphiquement le passé, le présent, le futur. Pour refléter l’étrangeté de notre réalité quotidienne, et la nostalgie qui la voile. »
Quel que soit le moment du temps sur lequel elle se porte, l’intensité du regard d’Art Spiegleman combine deux éléments : l’instinct et la recherche. Son travail final ne va pas sans une intense préparation. Nerveux et jetés, ses croquis portent en amorce la perfection du rendu final. À l’occasion de cette exposition, la Galerie Martel a le privilège rare de mettre en regard la genèse et l’aboutissement d’un travail sans relâche, celui d’un artiste majeur.
François Landon
Photos de l'exposition
Revue de presse

L'OBS
Trente ans après avoir reçu le prix Pulitzer pour "Maus", Art Spiegelman signe, à 73 ans, les illustrations d'une nouvelle de Robert Coover et un catalogue sur les le peintre Si Lewen. Rencontre à Paris, par Amandine Schmitt.

Le Monde
Art Spiegelman " Je sais que Maus me poursuivra jusqu'à ma mort" , par Jean-Luc Bertini/Pasco

dBD
Art Spiegelman, Le mariage du texte et de l'image, par Frédéric Bosser

Libération
Coover et Spiegelman, robots pour être honnête, par Mathieu Lindon
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Grand entretien à l’occasion de la parution de l’ouvrage Si Lewen, Parade, présenté par Art Spiegelman

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