Alex Barbier, né à Saint-Claude en 1950 (Jura) et mort en 2019 dans la même ville, était un dessinateur singulier, doté d’une personnalité fantasque.
Après des études d’art, il devient lui-même professeur de dessin. L’expérience tourne court : il est renvoyé de l’Éducation nationale au prétexte d’une « attitude subversive». Il profitera de son temps libre, en parallèle de son service militaire, pour concevoir un manifeste sur la bande dessinée.
Le jeune Barbier est un garçon « sauvage » et cela s’en ressentira dans son procédé artistique par des couleurs directes, une narration éclatée et des thématiques subversives. C’est dans Charlie Mensuel, en 1974, qu’il publie ses premières bandes dessinées. Gébé et Wolinski sont séduits par son univers hallucinatoire et son audace. Alors qu’il n’a que 26 ans, sa maturité artistique précoce est récompensée en Belgique par le Prix Saint-Michel du meilleur dessinateur étranger.
« Depuis que j’ai découvert mon premier album de Tintin, dans mon esprit la bande dessinée est un Tout que je tiens dans la plus haute estime. »
Avec Lycaons (Éd. Du Square, 1979) et Le Dieu du 12 (Charlie Mensuel, 1980), il propose une picturalité et une narration inédites pour le médium de la bande dessinée. Ses encres se fondent, offrant une palette toute en volutes brumeuses ou, au contraire, aux teintes tranchantes. On peut y percevoir l’influence de Francis Bacon, Soutine, Edward Hopper ou Lucian Freud.
Côté narration, il s’inscrit dans une contre-culture psychotropique, celle de la jeunesse hallucinée d’un William Burroughs ou d’un Louis-Ferdinand Céline. Parfois, la réalité semble concorder avec l’univers sulfureux et accidenté de Barbier. En 1985, un inconnu se présente dans un café du village où réside Barbier. Après avoir emprunté des allumettes, il met le feu à l’atelier de l’artiste. La majorité de ses planches seront réduites en cendres.
« Quant à celui qui n’aime pas la bande dessinée, c’est qu’il est soit trop vieux et on lui pardonne, soit un imbécile et on l’allume. »
1 & 3 – Autoportrait du Vampire d’en Face, Lettres au maire de V. volume II, 2000
34 x 48 cm
encre sur papier
Entre 1982 et 1994, Alex Barbier se consacre à la peinture avant de rapidement revenir à ses premiers amours avec Les Paysages de la nuit (Éd. Delcourt, 1994) et Comme un poulet sans tête (Éd. Delcourt, 1994). En 1994, la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image lui consacre une exposition accompagnée d’un reportage, Les Paysages de la nuit, réalisé par Jean-Pierre Delvalle et scénarisé par Thierry Groensteen. Alex Barbier y présente son village, Fillols, situé dans la périphérie de Perpignan (Pyrénées-Orientales), qui tient lieu de décor dans plusieurs de ses ouvrages.
C’est dans ce village qu’Alex Barbier fonde en 1997 avec sa compagne Aline, le Festival Plouc de Fillols, rassemblant la scène alternative littéraire francophone et notamment les éditions Frémok et Thierry Vanhasselt, avec qui il collabore sur le long terme. L’événement, à l’image de l’art de Barbier — qui y chante — est une fête chaotique, truculente et populaire. Principalement chapeauté par Aline Barbier, le festival devenu Qué Bazar se poursuivra jusqu’en 2014.
Avec Dernière bande (Éd. Frémok, 2014), il fait la même année ses adieux à la bande dessinée. Son ultime exposition se tient au Festival d’Angoulême, en 2015.
Du 29 mai au 4 novembre 2024, plusieurs de ses oeuvres sont exposées au Centre Pompidou, à Paris, dans le cadre de la grande exposition La BD à tous les étages.
______
BIBLIOGRAPHIE
2022 — Métempsycoses (Frémok)
2014 — La Dernière Bande (Frémok)
2006 — Pornographie d’une ville (Frémok)
2000 — Autoportrait du vampire d’en face (Fréon)
1998 — Lettre au maire de V. (Fréon)
1994 — Comme un poulet sans tête (Delcourt)
1994 — Les Paysages de la nuit (Delcourt)
1982 — Le Dieu du 21 (Le Square/Albin Michel)
1979 — Lycaons (Éditions du Square)
RÉCOMPENSES
1976 — Prix Saint-Michel (Belgique)
EXPOSITIONS
2024 — « La BD à tous les étages », Centre Pompidou (France)
2015 — « La Dernière Bande », Festival d’Angoulême (France)
PRESSE
France
ActuaBD — mai 2019 : Alex Barbier dessinait, peignait… et chantait !
France Info – janvier 2019 : Mort d’Alex Barbier, peintre et auteur avant-gardiste de bande dessinée
Livres Hebdo — janvier 2019 : Décès d’Alex Barbier, maître sulfureux de la bande dessinée
Politis — février 2015 : Alex Barbier bande flou
Bodoï — février 2015 : Angoulême 2015 : l’expo Alex Barbier
Le Monde — janvier 2015 : Alex Barbier est mort, vive Alex Barbier !
Bodoï — août 2014 : Dernière Bande (Critique)
ActuaBD — juin 2006 : Alex Barbier expose « Encres et foutre » à Paris
ActuaBD — juin 2006 : Pornographie d’une ville – Lettres au maire de V. volume 3 – Alex Barbier – Frémok (Critique)
Interview publiée dans L’Indispensable en octobre 1999
International
RTBF (Belgique) — novembre 2022 : « Métempsychose » d’Alex Barbier : quand la bande dessinée et la peinture se rencontrent
Le Soir (Belgique) — février 2019 : Une œuvre désenchantée, sans morale
The Comics Journal (États-Unis) — février 2019 : RIP Alex Barbier, poète maudit
RTBF (Belgique)— janvier 2019 : Alex Barbier : la mort d’un auteur de bande dessinée qui a toujours choisi de ruer dans les brancards !
Bruzz (Belgique) — septembre 2014 : La Dernière bande d’Alex Barbier
Bruzz — juin 2013 : Alex Barbier entre chien et loup