GARY PANTER

Jimbo

Exposition du 29 avril au 4 juin 2011

 

Si Gary Panter crée dans des domaines mutiples : peinture, comics, pochette d’album, décor, design, pub, musique –c’est sans doute parce qu’il a eu deux chances rares.

D’abord, un père gérant de bazar au Texas. On n’y trouve pas les comics léchés des grands studios, juste leurs copies criardes. Gary les dévore après la fermeture. Il se régale aussi des pin-ups nues livrées aux crocodiles des magazines adultes. Un fatras fifties qui sera l’âme de son monde.

La seconde chance de Gary est d’avoir été élevé selon les préceptes déjantés de l’Église du Christ : elle encourage le chant mais interdit les instruments, faisant de lui un musicien coupable et tout sauf une âme simple. Chez ses grands-parents, une vieille Bible illustrée par Doré lui fournit sa dose d’anges et de squelettes.

Sur ces bases, une oeuvre sans pareille se construit. Études d’art, départ pour Los Angeles, une première vraie expo de peinture, des affiches et des flyers de groupes punk, enfin la rencontre avec Pee-Wee Herman. Gary conçoit les décors du show Pee-Wee’s Playhouse, qui lui vaudront trois Emmy Awards. Surtout, il crée Jimbo, mix de punk et de plouc qui est son alter ego sur le papier.

Durant les Eighties, outre des pochettes pour Red Hot Chili Peppers, Frank Zappa et les Residents, il peint frénétiquement : « Je tente d’inventer des couleurs inédites », dit-il. « J’essaye de découvrir ce que je peux faire et que les autres n’ont pas fait, ou sont incapables de faire. » Lecteur de Ballard ou Burroughs, il ingurgite la Divine Comédie de Dante « cinquante ou soixante fois » parce que les aventures de Jimbo l’entraînent du Paradis à l’Enfer !

Rien d’étonnant à ce qu’il rencontre RAW, le magazin d’Art Spiegelman et Françoise Mouly. Aujourd’hui, à soixante-et-un ans, Gary Panter laisse enfin dormir au sous-sol son énorme stock de jouets cassés (quarante containers !), mais continue de modeler des marionnettes et de monter d’improbables maquettes d’architecture, de gratter sa guitare et surtout de peindre sans relâche, de dessiner sans répit, surfant en virtuose à la frontière de l’expression populaire et de l’art.

François Landon